Guerre des brevets entre Apple et HTC

En 2010 Apple accusait HTC de porter atteinte à sa propriété intellectuelle (brevets liés à l’interface, aux écrans, aux capteurs de mouvements et à l’architecture logicielle). L’ITC (International Trade Commission) avait finalement donné raison à Apple. En juillet 2011, c’est au tour de HTC de porter plainte contre Apple en Grande-Bretagne malgré sa première défaite aux États-Unis.

Ces enchainements de plaintes entre fabricants illustrent l’importance économique des brevets logiciels qui entraîne les entreprises à une guerre devant les tribunaux.

Du point de vue économique, les brevets ont pour objectif l’incitation à l’innovation par un octroi d’une position de monopole en échange de la divulgation du programme, enrichissant ainsi la connaissance commune. La publication du brevet permet la diffusion des connaissances et l’industrialisation de l’invention brevetée.
De ce point de vue, les brevets ont permis à l’industrie pharmaceutique une importante avancée technologique. Or pour l’industrie des logiciels, les impactes positifs sont moins évidents. La grosse différence entre l’industrie pharmaceutique et l’industrie des logiciels repose sur le type de produit : d’un coté nous avons un brevet pour un produit et de l’autre un produit avec plusieurs brevets. En effet, un logiciel est un produit complexe qui dépend d’un grand nombre de brevets.
L’innovation est alors découragée car il est trop difficile et trop coûteux d’identifier les brevets qui pourraient être pertinents dans le cadre d’une invention et de payer les licences qui pourraient être nécessaires (danger mortel pour les petites firmes).
La prolifération des brevets logiciels (maquis de brevet – anticommuns) crée une insécurité juridique : des pratiques délibérées d’attaques en contrefaçons, même injustifiées, destinées à déstabiliser un concurrent.

La demande dans le secteur de l’édition de logiciels

Les demandeurs de logiciels sont :

  • des entreprises pour lesquelles l’informatique représente une composante essentielle dans leur objectif de productivité et d’efficacité
  • les ménages et le grand public qui avec le développement d’Internet ont un besoin croissant d’applications réseaux (messagerie, multimédia, ..) et de services en ligne.

Editeurs de logiciels : segmentation par taille de comptes clients

La clientèle professionnelle est dominée par les Grands Comptes ayant un chiffre d’affaires de plus de 500 M€ avec 61% du marché des logiciels et services informatiques estimé par le Syntec en 2008. La demande est d’autant plus forte que la taille de l’entreprise est importante. Plus l’entreprise est importante, plus les besoins en logiciels informatiques sont nombreux.
Editeurs de logiciels : segmentation par industries clients
Le secteur présente une forte diversification de la clientèle en termes de domaines d’activité, qui traduit le caractère incontournable de l’informatique dans tous les secteurs de l’économie. On note la prépondérance de l’industrie avec 25% du marché, puis du secteur bancassurance avec 22,3%.

Les secteurs comme les transports, le commerce et l’industrie ont principalement des besoins en informatique de gestion (comptabilité, cycle de vie et traçabilité des produits, relations clients/fournisseurs). On parle aussi d’ERP.

Pour les banques et assurances, les dépenses informatiques sont récurrentes. La réglementation (Bale II) les contraint à adapter et harmoniser leurs systèmes d’information. D’après l’enquête TIC de l’INSEE en 2007, la gestion informatisée de la relation client est pratiquée par 63% des entreprises dans les activités financières tandis que la moyenne nationale se situe à 14% pour les entreprises de plus de 10 salariés.

Dans le secteur public, les projets de modernisation de l’Etat et de décentralisation vont alimenter le besoin en informatique et donc augmenter l’investissement dans les systèmes d’information.

Chiffres clés du secteur de l’édition de logiciels

Accédez à la fiche sectorielle de l’année 2010

Les logiciels sont utilisés dans tous les domaines industriels, financiers et de services. L’impact macroéconomique des logiciels se manifeste par un gain de productivité et de création de valeur donc vient améliorer la performance économique du pays. En France entre 1995-2000, les TIC ont contribué pour environ 0,9 point de croissance annuelle aux États-Unis, et 0,35 en France. Malgré l’importance stratégique du secteur, la France n’a pas d’acteurs de dimension internationale (à l’exception de Dassault Systèmes). Le secteur des logiciels est atomisé avec de nombreuses PME et TPE. En 2008, le poids des 10 plus grands acteurs par chiffre d’affaires représente 43% du secteur et le nombre d’entreprises de moins de 250 salariés représente 98% du total.

Avec près de 6,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2008, l’édition de logiciels représente seulement 12% de l’activité de la filière informatique.

 

 

 

Répartition des différents secteurs dans la filière informatique :

Performances économiques des éditeurs de logiciels

La figure suivante permet de positionner des groupes d’entreprises selon deux axes :

  • Le part de marché des groupes
  • Le taux de croissance annuelle moyen entre 2006 et 2008 des groupes

Chaque groupe d’entreprises a un taux de croissance dépendant de son cycle de vie par rapport à son activité. Plus les entreprises du groupe ont tendance à se positionner sur une nouvelle activité, plus les investissements sont importants. Réciproquement, plus l’activité est âgée moins les investissements sont importants.

Pour plus de détails : Outil de comparaison graphique des sociétés éditeurs de logiciels

Les modèles économiques des éditeurs de logiciels

L’offre de logiciel se divise en plusieurs parties :

  • la vente de licences ou d’abonnement
  • l’intégration du logiciel dans l’environnement du client
  • le support et la maintenance

Le modèle de revenu repose sur des contrats de vente de licences ou d’abonnements. Généralement, il s’agit de licence d’utilisation par utilisateurs qui inclut des correctifs pour un meilleur fonctionnement du logiciel. Les éditeurs de logiciels cherchent à augmenter la valeur-client par l’amélioration et le versionning du logiciel et la vente par bundle. La création de valeur est obtenue par les investissements en R&D qui confèrent à l’entreprise un avantage sur ces concurrents. La mobilisation de ressources humaines se fait en interne ou en externe par la sous-traitance ou l’offshore. Cela passe par le renforcement avec des experts, le partage de la connaissance et les politiques de partenariat ; soit avec d’autres éditeurs de logiciel, soit avec des SSII pour pallier une carence commerciale et technique. La capacité d’innovation joue un rôle capital dans la création de valeur. La maximisation des recettes est obtenue par :

  • Le versionning et le bundling.
  • Le verrouillage des clients.
  • Une couverture géographique et sectorielle la plus large possible

Les éditeurs de logiciels optimisent les coûts en agissant soit sur la masse salariale avec l’offshore ou alors en imitant les innovations des autres. Elles industrialisent la gestion des codes sources, le partage de connaissances et proposent des formations pointues à leurs ingénieurs. La mutualisation des moyens, la standardisation des offres et l’homogénéisation des outils permettent de maîtriser les marges.

Analyse typologique des entreprises éditeurs de logiciels

Typologie des entreprises éditeurs de logiciels

Axe1: oppose les modèles d’affaire basés sur l’abonnement de la vente de licences
Axe2: oppose les entreprises spécialisées métier, secteur ou finance aux entreprises généraliste

Caractérisation des groupes
Classe1 : Entreprises filiales étrangères

Variables stratégiques

  • Pas de spécialisation métier ni sectorielle (58%) ni secteur financier (100%), ni système embarqué (96%)
  • Vente de licences (100%)

Variables caractéristiques

  • Entreprises filiales (66%)
  • Entreprises étrangères (68%)
  • BFR par employé supérieur à 80k€ (37%)
  • Pas coté en bourse (96%)

Variables performances

  • 30% des entreprises du groupes ont un Résultat / CA entre 0% et 3%
  • 30% des entreprises du groupes ont un EBIT / CA entre 0% et 2,5%
  • 30% des entreprises du groupes ont un EBITDA / CA < 2%
  • 33% des entreprises du groupes ont un ROTA entre 0% et 3%
Classe2 : PME françaises spécialisées métier ou secteur en France

Variables stratégiques

  • Spécialisées métier (100%) et spécialisées dans un secteur (66%)
  • Vente de licences (100%)
  • Pas de présence à l’international (83%)
  • Cout salarial compris entre 45k€ et 36k€ (66%)

Variables caractéristiques

  • Effectifs compris entre 147 et 100 (42%)
  • BFR par employé compris entre 18k€ et 28k€ (33%)

Variables performances

  • 33% des entreprises ont une TCAM compris entre 5% et 3%
  • 33% des entreprises ont une TCAM compris entre 17% et 10%
Classe3 : Entreprises ou groupes avec modèle d’affaire basé sur l’abonnement B2B sur la France

Variables stratégiques

  • Modèle d’affaire abonnement (89%) et/ou SaaS (89%)
  • Pas de présence à l’internationale (78%)
  • Cout salariale compris entre 45k€ et 50k€ (55%)

Variables caractéristiques

  • Capital risque (66%)
  • Entreprises française (100%)
  • Capital public (44%)
  • Coté en bourse (44%)
  • Entreprises non filiales (89%)

Variables performances

  • 56% des entreprises ont un EBIT/CA compris entre 5% et 9%
  • 33% des entreprises ont un EBITDA/CA compris entre 7% et 10%
Classe4 : Entreprises spécialisées dans le secteur financier

Variables stratégiques

  • Spécialisées dans le secteur financier (90%)
  • Présence à l’international (90%)
  • Cout salariale compris entre 36k€ et 29k€ (50%)
  • Taux d’exportation supérieur à 10% (100%)

Variables caractéristiques

  • Levier financier faible (50%)

Variables performances

  • 40% avec ROCE supérieur à 56% et ROTA > 20%
  • 40% avec TCAM compris entre 10% et 17%
  • 50% avec profit par employé compris entre 20k€ et 38 k€
Classe5 : PME avec modèle d’affaire basé sur l’abonnement et/ou SaaS tournées vers l’international

Variables stratégiques

  • Modèle d’affaire abonnement (89%) et/ou SaaS (89%)
  • Clients B2C (44%)
  • Taux d’exportation supérieur à 10% (56%)
  • Cout salarial inférieur à 29k€ (44%)
  • Immobilisation incorporelle inférieur à 8% (44%)

Variables caractéristiques

  • 56% ont un âge < 12 ans
  • 44% solvabilité compris entre 35% et 44%
  • 33% avec effectif < 50

Variables performances

  • 67% avec TCAM > 28%
  • 44% avec rentabilité des capitaux propres compris entre 10% et 20%
  • 44% des entreprises ont un EBIT/CA compris entre 15% et 9%
Classe6 : Entreprises technologiques et d’ingénieries

Variables stratégiques

  • Logiciel système embarqué (44%)
  • Model d’affaire basé sur la vente de licence (100%)
  • Pas d’exportation (78%)
  • Clientèle B2B (100%)

Variables caractéristiques

  • Cotées en bourse (39%)
  • Notation A ou B (44%)
  • Participation public dans le capital de l’entreprise (44%)
  • Effectifs compris entre 200 et 400 (39%)

Variables performances

  • 39% ont un ROCE compris entre 18% et 30%
  • 33% ont un EBITA/CA compris entre 10% et 12%

Forces de Porter sur le secteur de l’édition de logiciel

Le modèle des 5 forces de Porter s’inscrit dans le même paradigme que le modèle dit structuraliste SCP issue de l’école de Harvard (Structure Comportement Performance). Les modèles structuralistes défendent l’idée qu’il existe un lien causal entre la structure des marchés, les comportements des firmes et leurs performances au sein du secteur.


Le modèle des 5 forces de Porter s’utilise dans l’analyse de la structure du secteur et permet d’identifier le régime de concurrence du secteur. Le régime de concurrence se caractérise par l’intensité de la pression concurrentielle et par le mode de la concurrence basé sur le prix, la
différenciation horizontale, la différenciation verticale et la différenciation par le service.

L’approche de Porter est axée autour des « cinq forces de la concurrence »

  • Intensité de la concurrence entre les firmes en place
  • Menace de produit de substitution
  • Menace de nouveau entrants
  • Pouvoir de négociation à l’égard des clients
  • Pouvoir de négociation à l’égard des fournisseurs

Le tableau suivant résume les 5 forces de Porter sur le secteur de l’édition de logiciel.

 

Entrants
potentiels

Editeurs étrangers

Sociétés de services (SSII)

Constructeurs et opérateurs télécoms

 

Amont

Fournisseurs

Pour les compétences techniques les
éditeurs font appel à des SSII et des partenaires.

 

Pour les composants logiciels et codes,
les éditeurs les achètent à d’autres éditeurs de logiciels

Concurrents du secteur

Secteur atomisé avec une très grande
majorité d’entreprises (90%) avec moins de 20 salariés.

Les grosses entreprises dominent le
secteur.

Aval

Clients

Pour le B2B, la distribution des
logiciels se fait en direct, par des partenaires (autres éditeurs), des
constructeurs et par des SSII.

Pour le B2C, la distribution se fait
par internet, par les circuits spécialisés

 

Substituts

Applications sur mesure

 

Secteur des logiciels en France

Accédez à la fiche sectorielle de l’année 2010

  • Le secteur du logiciel connait une concentration modérée ; en 2008 la part de marché des 4 plus grandes entreprises est de 18% si on exclut Dassault Systèmes qui représente à elle seule 17% des parts de marché du secteur.
  • De grandes firmes et de petites firmes coexistent dans le secteur.
  • Le secteur du logiciel est un secteur d’innovation, consommatrices de R&D. Les logiciels sont des produits de haute intensité technologique. Ceci a pour conséquence une instabilité des structures de marché. Les firmes en place peuvent perdre leur leadership lorsque de nouvelles ou petites firmes introduisent certains changements technologiques.
  • Les « effets de réseau » propres à l’économie numérique (adoption croissante des utilisateurs, faible coût marginal de production) font qu’au-delà de l’équilibre, le modèle économique de l’éditeur de logiciel génère une croissance et des marges substantielles. Ces caractéristiques créent une tendance structurelle :
    • à la concentration des acteurs
    • à l’adoption de standards de facto par le marché. Cette dynamique particulière soutient la course à la taille critique et la consolidation. Dans le secteur du logiciel, la part de marché est un indicateur essentiel pour juger le pouvoir de marché des firmes.
  • La structure des coûts spécifique au logiciel (coût fixe élevé et coût marginal faible) implique un régime de concurrence basé non pas sur le prix qui serait suicidaire mais plutôt sur la différentiation.
  • Les éditeurs de logiciels adoptent des politiques de tarification basées sur la discrimination par les prix : le versionning et le bundling.
  • Des stratégies de verrouillage de la clientèle sont mises en oeuvre par le renouvellement fréquent des logiciels et la maintenance, incitant les clients à revenir parce que l’entreprise met constamment sur le marché des versions nouvelles et améliorées de son logiciel.